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Misoprostol en gynécologie obstétrique : Une alternative à la chirurgie

Doctinews N° 48 Octobre 2012

Utilisé initialement pour traiter l’ulcère gastrique et/ou duodénal évolutif, le misoprostol rencontre un franc succès en gynécologie obstétrique depuis la découverte fortuite, il y a quelques années, de ses effets secondaires ocytociques. Aujourd’hui, il constitue une alternative intéressante à la chirurgie.

chraibi_chafik Chafik CHRAIBI

Bien qu’il n’ait pas d’autorisation de mise sur le marché pour des indications en gynécologie obstétrique, le misoprostol a largement fait ses preuves.


Le misoprostol appartient à la classe pharmacothérapeutique d’anti-ulcéreux et prostaglandine. Préconisé pour le traitement des ulcères gastriques et/ou duodénaux évolutifs, ce médicament possède des propriétés cytoprotectrices qui renforcent l’intégrité de la barrière muqueuse de l’estomac et du duodénum à l’égard des agents nocifs. Bien qu’aucune étude pharmaceutique d’évaluation classique des effets de cette molécule en gynécologie obstétrique n’ait été entreprise jusqu’à présent, certains organismes sanitaires prestigieux, notamment la Food and Drug Administration (FDA), ont reconnu son intérêt et insistent sur l’importance d’élaborer un guideline d’utilisation du misoprostol pour le déclenchement du travail chez la femme enceinte. L’Organisation mondiale de la santé (OMS), pour sa part, a annoncé en 2009 l’inclusion de ce produit dans sa liste de médicaments essentiels sur la base de son innocuité et de son efficacité prouvées pour le traitement de l’avortement incomplet et de la fausse couche. Aujourd’hui, le misoprostol est homologué dans plus de quatre-vingts pays à travers le monde.

Des indications variées
Les indications du misoprostol en gynécologie obstétrique sont variées. Il est utilisé pour stopper l’hémorragie de la délivrance. Cette complication de l’accouchement, appelée également hémorragie du post-partum, est une hémorragie d’origine utérine qui survient dans les vingt-quatre heures suivant l’accouchement. Il s’agit d’une cause majeure de mortalité maternelle, avec 25 % de cas à l’échelle mondiale. Les obstétriciens recourent au misoprostol pour le déclenchement artificiel du travail lorsque la poursuite de la grossesse comporte des risques pour la santé de l’enfant ou de la maman, par exemple, en cas de grossesse prolongée supérieure à 42 semaines d’aménorrhées, d’hypertension artérielle, de diabète ou de mort fœtale in utéro, à terme. Le misoprostol est également préconisé pour le déclenchement du travail avant terme, dans le cadre des interruptions thérapeutiques de grossesse. De nombreuses études ont en effet montré l’efficacité et l’innocuité du misoprostol, seul, dans la prise en charge des interruptions thérapeutiques de grossesse. Enfin, ce médicament aux effets ocytociques est utilisé pour les hystéroscopies, interventions endoscopiques visant à explorer l’utérus. Il favorise la dilatation du col de l’utérus pour l’introduction de l’hystéroscope et l’examen l’intérieur de l’utérus. Les spécialistes recommandent toutefois aux obstétriciens d’être vigilants quant aux doses administrées, car le misoprostol est un produit hypercontracturant pouvant entraîner parfois des ruptures utérines très graves. Les indications thérapeutiques et les risques doivent êtres bien évalués et les contre-indications écartées (notamment en cas de macrosomie, d’utérus cicatriciel ou d’une grande multipare).

Une « potion magique »
Qualifié par certains obstétriciens de véritable « potion magique », le misoprostol se révèle être une alternative intéressante au curetage, un geste chirurgical pratiqué dans le cadre d’interruptions thérapeutiques et médicales de grossesse ou en cas de fausse couche. Il a prouvé son efficacité dans l’évacuation des débris de l’intérieur de l’utérus et peut ainsi éviter à la femme le stress dû aux interventions chirurgicales et les complications qu’elles peuvent engendrer. Plus abordable que les autres produits recommandés pour les mêmes indications en gynécologie obstétrique, notamment le nalador, le misoprostol est particulièrement adapté aux pays en voie de développement qui, souvent, manquent de moyens et de structures adéquates pour effectuer les interventions chirurgicales qui s’imposent en cas de complications de la grossesse. Il est peu coûteux, facile à transporter et à administrer et son stockage ne requiert pas de réfrigération, même sous les climats chauds. Les pays qui ont adopté ce médicament en gynécologie obstétrique ont vu le taux de la mortalité maternelle baisser sensiblement. Au Maroc, les chiffres révèlent que ce taux est passé de 228/100 000 naissances à la fin des années 90 à 112/100 000 naissances actuellement. Bien que le misoprostol ne soit pas le seul facteur qui explique cette baisse de la mortalité, il a grandement contribué à l’amélioration de la santé maternelle au Maroc en permettant de réduire les risques liés à l’interruption de la grossesse et à l’accouchement. Les spécialistes notent toutefois que ce produit est de plus en plus utilisé clandestinement au Maroc par les femmes qui désirent interrompre leur grossesse, ce qui constitue un danger pour leur santé.


Efficacité testée au Maroc
Une étude prospective menée auprès de 225 femmes et conduite sur une période de 15 mois par le Professeur Chafik Chraïbi, chef de service gynécologie obstétrique au sein de la maternité des Orangers de Rabat, a permis de confirmer les effets bénéfiques du misoprostol. L’objectif a été de démontrer l’efficacité, l’innocuité et la tolérance de ce médicament et de le comparer aux autres prostaglandines couramment utilisées pour le déclenchement du travail avant et à terme, pour stopper l’hémorragie de la délivrance et pour préparer le col avant l’hystéroscopie. Les critères d’inclusion et d’exclusion de la population qui a pris part à cette étude, ainsi que le protocole, ont été établis suivant chaque indication. Ont été évalués les paramètres cliniques, gynécologiques, obstétricaux, l’état maternel et fœtal de chaque cas avant et après la pose du misoprostol, ainsi que l’efficacité et la survenue d’effets secondaires selon la dose et le délai d’induction. Les résultats ont révélé un taux d’efficacité de 92,40 % pour les grossesses arrêtées et les rétentions post-abortives, de 95,7 % pour l’hémorragie de la délivrance, de 97,37 % pour l’interruption thérapeutique de grossesse pour les cas entre 15 et 24 semaines d’aménorrhées et de 100 % pour le déclenchement du travail à terme. Les effets secondaires ont été minimes et transitoires (voir encadré), avec 17,54 % dans les interruptions thérapeutiques de grossesse, tous âges gestationnels confondus, et 9,75 % dans l’hémorragie de la délivrance. Un seul cas d’hypercinésie utérine, sans conséquence, a été noté dans le déclenchement du travail à terme. Deux cas (4,3 %) d’hémorragie de la délivrance ont nécessité un recours à l’hystérectomie d’hémostase. Aucun cas de mortalité maternelle ou fœtale n’a été enregistré. Bien qu’il n’ait pas d’autorisation de mise sur le marché pour des indications en gynécologie obstétrique, le misoprostol a largement fait ses preuves dans ce domaine. Les résultats obtenus au terme de cette étude, associés à ceux de la littérature, confirment l’efficacité et la bonne tolérance du misoprostol qui se veut être une alternative intéressante, notamment à la chirurgie.


Des effets indésirables minimes

Cliniquement, aucun effet indésirable significatif n’a été imputé au misoprostol, que ce soit sur le plan hématologique, endocrinien, biochimique, immunologique, respiratoire, ophtalmologique ou cardio-vasculaire. Le plus fréquemment signalé au cours des essais cliniques a été une diarrhée modérée, cédant même en cas de poursuite du traitement. Des nausées et des vomissements peuvent aussi survenir, mais elles disparaissent généralement au bout de deux à six heures. Certaines femmes sous misoprostol décrivent un goût désagréable quand le médicament est pris par voie sublinguale ou buccale. Un sentiment d’engourdissement au niveau de la bouche et de la gorge a également été rapporté lors de l’administration par voie sublinguale. Une fièvre et des frissons peuvent aussi apparaître après l’administration de doses élevées de misoprostol au cours du troisième trimestre de grossesse ou en post-partum immédiat. Plus rarement, des troubles menstruels, spasme utérin, saignement vaginal post-ménopausique peuvent survenir. Toutefois, des doses cumulatives, allant jusqu’à 2200µg, administrées sur une période de douze heures ont été tolérées par des femmes enceintes, sans effet indésirable notable. Il n’existe par ailleurs pas de pharmaco-dépendance à ce médicament.

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